La jungle, dont l’évocation est parfois péjorative malgré sa diversité, sa vitalité et son utilité. Tenons-nous en donc aux aspects positifs de cet incroyable vivier pour parler des gouvernances partagées.

Car derrière ce terme générique, vulgarisé par l’Université du Nous, il y a surtout une histoire, des recherches, des tâtonnements et surtout des évolutions. Et derrière ce terme, il y a aujourd’hui une variété d’approches, de visions et de pratiques que nous allons tenter de défricher.

La sociocratie

Aux racines de la gouvernance partagée, il y a la sociocratie théorisée par Gérard Endenburg en 1970. Si l’on prend soin de creuser un peu, on se rend compte alors qu’il s’inspire des travaux que Kees Boeke a mené dans le cadre de l’école alternative qu’il suivait dans les années 30. Car c’est déjà dans ce cadre scolaire que les décisions sont prisent par consentement.
La sociocratie apporte plusieurs éléments qui sont encore aujourd’hui largement appliqués dans de nombreuses formes de gouvernance partagées :

  • la prise de décision par consentement,
  • l’élection sans candidats,
  • le rôle facilitation
  • et le double lien.

De plus, dans une structure en cercle, chaque cercle défini sa vision, sa mission et ses objectifs. Que reste-t-il donc à ajouter ?

L’Holacracy

La révolution suivante survient avec l’Holacracy en 2009, sous l’impulsion de Brian Robertson. La sociocracy a été pratiquée dans le cadre d’une entreprise, HolacracyOne, et enrichie par diverses méthodes agiles. Il en résulte une «constitution», soit un ensemble de règles du jeu cohérents permettant de décrire, ajuster et faire évoluer une structure, de la plus simple à la plus complexe. Aux processus collectifs de la sociocratie, l’Holacracy offre son pendant individuel, le rôle opérationnel. Ce rôle opérationnel permet de distribuer l’autorité et jouer avec les modes de décision. Parfois délégués à une personne lorsqu’il faut pouvoir décider vite, parfois ramené au collectif lorsqu’il s’agit de générer de l’engagement et de l’adhésion.

La forme écrite de cet ensemble de règle permet également de penser le système comme évolutionnaire : en définissant les règles, mais également la façon de changer les règles, l’Holacracy se positionne dans un monde en constante évolution, un monde de recherches, d’expérimentations et d’améliorations.

Depuis, de nombreuses variantes voient ou ont vu le jour, qu’elles s’inspirent de la sociocratie ou de l’Holacracy. Parmi les modèles rendus public, on peut citer :

Mais de nombreuses organisations ont créé leur propres modèles, comme La Loycocratie chez Loyco ou la PPP-cratie chez Pain Pour le Prochain.
Toutes combinent cette base, ce tronc commun que peuvent être la prise de décision par consentement ou les structures en cercles, à des influences extérieures. Ainsi l’holycratie s’inspire de la connexion au vivant (ou au divin), la gouvernance organique s’appuie sur la pleine conscience de soi dans le collectif, le modèle Z intègre le Rêve du Dragon défini par John Croft.

La gouvernance cellulaire

En ce qui concerne la gouvernance cellulaire, l’inspiration de Jean-Luc Christin, son initiateur, prend sa source dans l’élément humain de Will Schutz. Ce guide de développement du leadership permettant de créer un environnement de travail humaniste, responsable et ouvert donne son sens au slogan de la GC : l’efficacité humaniste.

Car c’est bien l’apport et le champ d’expérimentation de la gouvernance cellulaire : comment pouvons-nous en même temps être efficace dans nos actions, utilisant judicieusement les ressources à notre disposition et les contributions de chacun, et humaniste, s’assurant d’un système juste, claire et favorisant le développement de chacun des membres de l’organisation ?

La gouvernance cellulaire pose de bonnes bases dans cette direction, et offre une panoplie d’outils à activer si besoin pour traiter tant les aspects opérationnels que relationnels. Pour autant, la GC ne se prétend pas finalisée (ni parfaite) et continue d’évoluer chaque année sous l’impulsion de ses utilisateurs et utilisatrices.

Nous n’avons donc pas fini de défricher la jungle des gouvernances partagées, et nous ne pouvons que nous réjouir de tout ce qui continuera d’émerger dans les prochaines années. Pour suivre l’évolution de la gouvernance cellulaire, n’hésitez pas à visiter gouvernancecellulaire.org, un site riche en ressources et en informations sur cette approche.